Née en 1950 à Gallipolis (Ohio), Jenny Holzer est la fille et la petite-fille de concessionaires chez Ford; mais détrompez-vous, la voie choisie par la jeune fille n'aura aucun lien avec l'industrie automobile. Son intérêt pour les lettres l'incite à entamer des études artistiques. Ainsi, à l'âge de 18 ans, elle est acceptée à l'Université de Duke à Durham (Caroline du Nord), continue à l'Université de Chicago le dessin, la peinture et l'imprimerie, pour terminer à l'Université de l'Ohio où elle sera diplômée des Beaux-Arts (option peinture et imprimerie). Elle s'installe alors à New-York pour poursuivre sa formation; elle visite aussi les grands musées européens durant un voyage en Europe.

De 1974 à 1977 (date d'élaboration de ses premiers Truisms), elle participe à des cours tels que celui de la Rhode Island School of Design (où elle obtiendra son Master of Fine Art) mais tout particulièrement au programme d’étude indépendant du Whitney Museum of American Art à New York. Elle s'intéressera alors aux artistes conceptuels (Joseph Kosuth pour son travail sur le langage et l'écriture, et consors) et reste fascinée par le travail sur le corps et les mots de son professeur Yvonne Rainer. 1977, elle elabore ses premiers Truisms (des textes sous forme d’aphorismes) au Whitney. Les Truisms sont pour Jenny Holzer des “ clichés simulés ” reformulés dans l’esprit d’une parodie des grandes idées du monde occidental.

De 1978 à 1980, elle présente ses Truisms (1977-1979) chez Franklin Furnace, effectue un projet special, Jenny Holzer Painted Room, pour le PS1 en 1978 et travaille comme photocompositeur au Old Typosopher de Daniel Shapiro à New York. Elle organise, en 1979, Manifesto Show avec Colen Fitzgibbon à New York, ce qui marque le début de sa collaboration avec le groupe d’artistes Collaborative Projects (Colab).
Les Inflammatory Essays (1979 - 1982), deuxième série de textes inspirés par différentes "lectures rouges" et imprimés sur des affiches de papier offset bon marché, sont collés sur les murs des immeubles de SoHo et d’ailleurs. Cette série invite à méditer sur la condition humaine et préfigure une démarche entièrement tournée vers un art public fait de signes et de codes identifiables par tous et conçu en fonction des lieux d’exposition. Imprimés sur des affiches de couleurs différentes, les Inflammatory Essays ont un format standard de cent mots sur vingt lignes. Ces textes sont plus véhéments, plus structurés et plus politiques que les Truisms. Elle presentera ses essais lors de sa participation à la Dokumenta 7 à Kassel.

Se succèdent ensuite les expériences de supports pour ses Truisms, affiches, T-shirts, mais aussi et surtout les panneaux publicitaires de Times Square; la vitesse variable à laquelle défileront ses truismes lui permettent d'évoquer la subtilité de la pensée. Elle travaillera avec l’artiste Peter Nadin sur la série des Living (1980-1982) dont une partie sera publiée et exposée à la Galerie Barbara Gladstone à New York. La série Living s’appuie sur des formes et des supports officiels de communication écrite, comme les plaques de bronze ou d’aluminium qui, habituellement, présentent des informations civiques, commerciales ou politiques. Les textes de la série Living sont dans l’ensemble plus proches de la vie quotidienne. En 1981, conçoit sa première exposition dans une institution muséale française, au Nouveau Musée de Villeurbanne.

A partir des années 80, sa production s'amplifie et le succès la guette: les textes de la série Survival (1983-85) sont diffusés sur des panneaux publicitaires de type Unex, accompagnés d’illustrations électroniques, Under a Rock est la première série intégrant des bancs de granit, elle est sélectionnée pour représenter les Etats-Unis à la Biennale de Venise en 1990 où elle gagenra un Lion d'or, la série Laments (1989) est présentée à la Dia Art Foundation sur treize sarcophages de granit noir de Nubie, de marbre vert antique, de marbre rouge d’Ankara et d’onyx, et autant de LED signs synchronisées (elle écrit les textes des Laments alors que l’épidémie de SIDA fait des ravages); dans le cadre de son exposition au Salomon R. Guggenheim Museum à New York, Jenny Holzer expose une sélection de ses textes en LED signs le long des coursives conçues par l’architecte Frank Lloyd Wright, alors que des bancs gravés avec les séries Survival et Living forment une installation circulaire dans la rotonde et un alignement dans la galerie haute.

Revenons à 1990 et à la Biennale: elle y présente Mother and Child et des extraits d’autres séries gravés sur des plaques commémoratives de marbre rouge, bordées de marbre noir, sur un sol carrelé de marbre clair, articulés à des textes verticaux en LED signs. Hors du pavillon, des spots télévisuels, des affiches et des signes dans les taxis et les vaporettos prolongent son installation. Mother and Child est un texte sur les liens et les peurs qui unissent la mère et l’enfant. Jenny Holzer est la première femme récompensée par le Lion d’Or à Venise.
Elle participe à l’exposition collective du Centre Georges Pompidou, à Paris, Art & Pub : Art et Publicité 1890-1990 et inaugure sa première installation permanente Installation for Aachen le 10 juin 1991 au musée Ludwig à Aachen, en Allemagne.

Pendant la guerre du Golfe, elle expose à Bâle la série War (1992), lors de l’exposition collective Transform : BildObjekt-Skulptur im 20. Jahrhundert à la Kunsthalle et au Kunstmuseum. Les LED signs rendaient infranchissables les escaliers de la Kunsthalle.

Les atrocités commises contre les femmes lors de la guerre en République Fédérale de Yougoslavie constituent l’une des sources de la série Lustmord (1993-1995), un projet conçu pour le Süddeutsche Zeitung Magazin de Munich. Les photographies des textes écrits à la main à même la peau sont reproduites sur une trentaine de pages à l’intérieur du magazine alors que la couverture révèle des impressions d’encre incluant du sang humain de huit femmes bosniaques réfugiées en Allemagne. Le Centre Georges Pompidou expose à Paris, en 1995, Lustmord dans Féminin masculin : le sexe de l’art. L’installation comportait trois séries de textes en LED signs illustrant le point de vue de l’auteur du crime, de la victime et de l’observateur. Des tables recouvertes d’os auxquels étaient fixées des bagues d’argent gravées de ses textes accompagnaient ce dispositif.
Au Guggenheim Museum de Soho, elle produit en collaboration avec Sense8 et Intel deux pièces pour l’exposition Virtual-Reality : An Emerging Medium utilisant les textes de Lustmord .
Inauguré à Nordhorn en Allemagne, le 28 octobre 1994, Black Garden est un “ anti-mémorial ” de la Seconde Guerre Mondiale qui marque le 50ème anniversaire, en témoignant de l’absurdité et de la cruauté de la guerre. Le 8 mai 1995, Erlauf Peace Monument est inauguré à Erlauf en Autriche. En 1996 Elle réalise un projet à partir de la série Lustmord pour le Völkerschlachtdenkmal (monument à la mémoire du massacre des peuples) à Leipzig en Allemagne.
Elle collabore avec Helmut Lang pour créer I Smell You on My Skin pour Il tempo e la moda, la Biennale de Florence. Préalablement écrits pour Red Hot and Dance, une vidéo traitant du sida, dirigée par Mark Pellinfton, les textes de la série Arno (1996) sont remaniés pour la biennale. Son œuvre comprend des LED signs verticaux fixés à l’intérieur du pavillon d’Arata Isozaki et une première projection au xénon sur la rivière Arno.

En 1997, elle dispose d'une exposition permanente au musée Guggenheim à Bilbao dans la galerie Frank Gehry.

En 1998, la série Blue est présentée avec d’autres séries à la Galerie Yvon Lambert à Paris et à la Galerie Monika Sprüth à Cologne.
Elle réalise le projet Art Car, apposant ses textes sur une voiture de course qui participe aux 24 Heures du Mans en France.

Inauguration le 8 septembre 1999 de Goerdeler Memorial à Leipzig.
En 2001, Jenny Holzer conçoit pour la Neue National-Galerie dans l’architecture de Mies van der Rohe, une installation de treize LED signs, couleur ambre, fixés sur les parties hautes de l’architecture. Sur 49 mètres de long, selon des rythmes complexes programmés sur ordinateur, elle diffuse OH et divers textes. Ce texte fut écrit lors de son année passée à l’American Academy de Berlin et complété lors de son dernier séjour à Berlin. Des projections au xénon d’extraits de plusieurs autres séries sont programmées sur les façades de la bibliothèque municipale, de l’Université Humboldt, du Pergamonmuseum ou encore de l’Hôtel de Ville de Berlin.
Le projet pour la nef du CAPC Musée d’Art contemporain de Bordeaux s’inscrit dans la logique expérimentale de Jenny Holzer. Confrontant le langage de ses signes aux codes architecturaux, différents textes (Truisms, Arno, Blue…) associés à sa dernière série OH, prennent à partie le cœur du bâtiment en fixant au sol de longues lignes de LED signs couleur ambre.

Du 20 septembre au 4 novembre 2001, elle expose à la chapelle Saint-Louis de la Salpêtrière un pilier lumineux de 36 mètres de haut allant du sol jusque dans l'oculus de la coupole, les textes se perdant ainsi dans le ciel.

[ Cette biographie a été élaborée en grande partie grâce au de dossier de presse sur Jenny Holzer diffusé par le site du Festival d'Automne 2001, et par deux articles du Monde parus le 7 aôut 2001 ("Les lettres indélébiles de Jenny Holzer" par Philippe Dagen) et le 13 septembre 2001 ("Jenny Holzer, la chair des mots et la peau du monde à vif" par Geneviève Breerette) ]

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